Quand le cancer revient

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La guérison d’un cancer est définie par le temps, c’est une rémission qui dure et un cancer qui ne récidive pas. La rechute, ou récidive, signifie que la maladie qui s’était en quelque sorte « endormie » se « réveille ». « Il ne s’agit pas d’un second cancer, mais de la résurgence d’un cancer déjà traité, explique le Dr Mario Di Palma, oncologue à l’Institut Gustave-Roussy. Ce qui ne veut pas dire que le traitement initial a été inutile mais insuffisant. La rechute est liée à la persistance de cellules tumorales. » Selon les types de cancer, les éventuelles récidives se produisent dans des délais très variables (plusieurs semaines, des mois ou plus rarement des années après le traitement) et dans diverses localisations. La tâche des médecins cancérologues consiste à évaluer les risques de récidive au plus près. D’où l’intérêt des traitements succédant au traitement initial appelés traitements adjuvants : leur objectif est de réduire le risque de récidives. Le taux de rechute d’un cancer dépend de facteurs biologiques pas tous connus (morphologie cellulaire en termes d’architecture, interactions moléculaires, etc). L’important, pour Mario Di Palma, c’est que « la rechute ne veut pas dire qu’on ne peut pas guérir. » Pourtant, une récidive est toujours un choc violent pour le malade. A-t-il fait tous ces efforts pour rien ? La maladie n’en finira-telle jamais ?

Les mécanismes de la rechute

La rechute peut se manifester de deux façons : la récidive locale ou loco-régionale, qui siège sur le lieu même ou dans le proche voisinage de la tumeur primaire. Ou les métastases, qui siègent à distance de la lésion initiale et souvent dans un organe tout à fait différent. Elles sont liées au développement de cellules tumorales qui ont migré à distance, véhiculées par le courant sanguin ou lymphatique. Selon le type de cancer et les traitements déjà reçus, une récidive locale peut être traitée par la chirurgie ou par des rayons, suivis de chimiothérapie ou d’hormonothérapie. Si l’on constate que les cellules ont essaimé ailleurs, la chirurgie seule ne suffit pas et est souvent complétée par des traitements médicaux. Mais il n’existe pas de traitement spécifique à la rechute. La réponse se fait au cas par cas, en fonction de l’histoire du patient et de la maladie. « Quand on prend en charge un patient, on tient compte à la fois du patient et de ses fragilités et de la cartographie génétique de la maladie », explique le Pr Jean-Louis Pujol, chef d’équipe d’oncologie thoracique au CHU de Montpellier et docteur en psychologie.

Le stade, le grade et divers paramètres biologiques, propres à chaque type de cancer, sont autant de renseignements qui servent à établir quel sera le meilleur traitement pour empêcher les rechutes. « Chaque cas est particulier », précise Jean-Louis Pujol. « Aujourd’hui, le maître mot des stratégies thérapeutiques dans la lutte contre les cancers est le traitement individualisé. Il s’agit d’un traitement à la carte correspondant à la “personnalité génétique” du patient. »

Des thérapies ciblées

AUJOURD’HUI, LE MILIEU MÉDICAL EST TRÈS IMPLIQUÉ DANS CETTE PHASE D’ANNONCE : MÉDECIN TRAITANT, INFIRMIÈRES, CHIRURGIENS, ONCOLOGUES… TOUS S’EFFORCENT DE PROPOSER AU MALADE UN “SERVICE À LA CARTE”. « Les thérapies ciblées permettent d’envisager des traitements personnalisés, en fonction de la carte d’identité de la tumeur », précise Jean-Louis Pujol. Ils offrent des espoirs, là où les traitements classiques – chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie –, échouent. Au lieu de tuer à l’aveugle toutes les cellules malignes ou saines, comme le fait la chimiothérapie, les produits n’attaquent que les cellules cancéreuses. Ces thérapies peuvent être des armes vraiment efficaces contre le cancer. Il existe aujourd’hui deux grandes familles de médicaments ciblés, tous visant à freiner ou à bloquer la croissance des cellules cancéreuses. Les anticorps monoclonaux, qui se fixent sur des récepteurs à la surface des cellules cancéreuses. Ils ont par exemple beaucoup amélioré le pronostic de cancers du côlon métastatiques. Et les inhibiteurs, qui empêchent une enzyme de fonctionner à l’intérieur des cellules tumorales, et qui ouvrent de nouveaux horizons notamment dans certains cas de mélanomes, de cancers du poumon et de cancers gastrodigestifs. Dans le cas des cancers du sein dits “hormono-dépendants”, il existe aujourd’hui un traitement à base d’antiaromatases qui permet de réduire la production d’oestrogènes chez la femme ménopausée. Avec ce médicament, les risques de rechute sont de 20 à 50 % moins importants. Mais les thérapies ciblées ont aussi leurs limites. Beaucoup de tumeurs cancéreuses ont une organisation complexe. Quand on cherche à les bloquer avec un agent très ciblé, elles peuvent compenser et résister au traitement. C’est pourquoi chaque médicament ciblé nécessite la mise au point d’un test de génétique moléculaire pour savoir quels sont les patients susceptibles d’en bénéficier.

L’annonce, une étape importante

La personnalisation ne se limite pas à la maladie, elle tient aussi compte de la personne malade. « Lorsqu’on est en situation de récidive, précoce, à moyen terme ou plus tardive, on repart dans un cycle de bilan, de biopsie et de traitements qui justifient largement une annonce humanisée », rappelle Mario Di Palma. « Le fait que les personnes aient déjà été confrontées à la maladie ne rend pas les choses plus faciles, au contraire. L’anxiété et le découragement sont souvent là. Il est donc important de mettre en place les moyens humains. On peut bien entendu se référer au dispositif d’annonce mis en place dans le Plan cancer 2007-2013. Mais plus que d’une annonce, ce sont des annonces dont il faut parler. Elles doivent respecter l’histoire particulière du patient. Aujourd’hui, le milieu médical est très impliqué dans cette phase d’annonce : médecin traitant, équipe d’infirmières, chirurgiens, oncologues… tous s’efforcent de proposer au malade un “service à la carte”. Tous les patients n’ont pas besoin ou envie d’être suivi par un psychologue, un kiné et un psychiatre. On doit tenir compte de la situation de chacun et ne pas suivre un parcours balisé identique pour tous. Le vrai message, dans cette deuxième annonce, c’est qu’on peut guérir d’une récidive », conclut Mario Di Palma.

 

Brigitte Perrin

LA RECHUTE NE VEUT PAS DIRE QU’ON NE PEUT PAS GUÉRIR.

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