Parce que l’estime de soi est souvent malmenée par le cancer et ses traitements, la socio-esthétique utilisée comme soin de support est un précieux soutien pour les malades. Éclairage sur une discipline qui émerge.
Encore souvent méconnue, la socio-esthétique est proposée dans plusieurs établissements médicosociaux. Basée sur les soins du corps (massages, manucure, maquillage correcteur, etc.), cette discipline apporte une réponse personnalisée aux malades, en s’adaptant à leurs maux et leurs attentes. Une séance de socio-esthétique, c’est un temps d’écoute privilégié autour du rapport au corps, des effets de la maladie et des traitements. « Cette pratique s’inscrit dans les projets de soin définis par les équipes pluridisciplinaires avec lesquelles nous travaillons, précise Christine Biardeau-Schwok, socio-esthéticienne à l’hôpital de Chinon. Notre mission a donc une vraie visée thérapeutique reconnue et appréciée par le personnel médical. »
L’utile par l’agréable
Mais le réel bénéfice de la socio-esthétique, ce sont les patients qui en parlent le mieux. « Quand j’ai été hospitalisée en chambre stérile pendant quatre semaines pour le traitement d’un lymphome de Hodgkin, la socio-esthétique m’a vraiment aidée à accepter cette situation, raconte Chantal Greppo. J’étais particulièrement nerveuse et, dès la première séance, les mots et le toucher de la socio-esthéticienne m’ont apporté un bien-être immédiat que j’ai souhaité renouveler régulièrement. » Ouvert aux femmes comme aux hommes, ce type de soins joue également un grand rôle dans l’acceptation d’un nouveau corps, parfois transformé, sensibilisé par la maladie. « Nous connaissons les bons gestes pour permettre aux patients de retrouver des sensations agréables sans jamais les heurter dans leur dignité, explique Christine Biardeau-Schwok. Par le maquillage ou le conseil dans l’utilisation de certains produits, nous leur apprenons également à retrouver le goût de prendre soin de soi, de mettre pour un instant la maladie entre parenthèses. » « Opération réussie ! », conclut Chantal Greppo.
Un partenariat au bénéfice des patients
Dans le cadre du deuxième congrès de socio-esthétique qui s’est déroulé le 15 avril dernier à l’Institut Pasteur, la Ligue contre le cancer a annoncé officiellement son partenariat avec le CODES*. Le professeur Jacqueline Godet, présidente de la Ligue, est « convaincue de l’importance et de l’efficacité de la socio-esthétique en cancérologie ». La professionnalisation est indispensable pour intervenir auprès de personnes fragilisées et la démarche « qualité » entreprise par le CODES garantit des pratiques adaptées pour un mieuxêtre des patients.
* Centre de formation à la socio-esthétique.
L’avis de la socio-esthéticienne : Christine Biardeau-Schwok
« Contrairement à l’esthétique, la socio-esthétique est une pratique sur-mesure, intégrée dans un projet de soins. »
« Chaque séance débute par un temps de présentation et d’écoute indispensable. En fonction des besoins du patient, de ses douleurs, je propose un soin adapté : manucure si la personne cherche avant tout un échange, modelage du visage ou massage pour la détente… En tant que socio-esthéticienne à l’hôpital, je suis intégrée à l’équipe de soignants. Ils m’informent de l’état de santé des patients et me signalent les éventuelles précautions à prendre pour que je puisse travailler dans le plus grand respect du malade. À mon tour, je produis des bilans écrits pour contribuer au suivi de chaque patient. Ma formation de socio-esthéticienne et les stages en hôpitaux prévus dans le cadre de ce cursus m’ont appris à m’adapter au milieu médical, un cadre très différent du salon d’esthétique. Appréhender le corps malade est un métier à part entière, qui nécessite un réel savoir-faire. Si certains patients montrent une petite réticence au départ, tous me remercient en constatant les effets bénéfiques de la socio-esthétique sur leur moral, leur rapport au corps. Grâce au Comité d’Indre et- Loire de la Ligue, mes soins aux malades sont totalement pris en charge. Une initiative remarquable. »
Témoignage d'Hélène Alirand, atteinte d’un cancer du sein
« Chaque séance m’aide à lâcher prise et à mieux lutter contre la maladie. »
« Malade depuis douze ans, je réalise un travail sur moi-même pour apprendre à vivre avec la maladie et à accepter les transformations de mon corps. La rencontre avec une socio-esthéticienne au centre hospitalier Lyon-Sud m’a permis d’être accompagnée dans cette démarche. Ses massages, ses soins, mais aussi ses qualités d’écoute m’apportent chaque semaine une détente et me permettent de lâcher prise, d’oublier la maladie. Ce type de soins permet de retrouver une image positive de soi avec des effets immédiats sur le moral. Au final, on accepte mieux les traitements. »
VRAI - FAUX
Les soins de socio-esthétique sont gratuits.
Vrai : dans les établissements médicaux ou à domicile, ces soins sont gratuits pour les bénéficiaires. Dans les établissements sociaux, un euro symbolique peut être demandé aux participants pour les rendre acteurs de leur réinsertion.
Une esthéticienne peut pratiquer la socio-esthétique.
Faux : pour exercer la socio-esthétique, il faut un diplôme en esthétique, deux ans d’expérience professionnelle minimum et une formation certifiée par l’État d’environ neuf mois, comprenant un stage en milieu médical ou socio-éducatif. En France, ce cursus est proposé par le Centre de formation à la socio-esthétique, le CODES (COurs D’ESthétique à option humanitaire et sociale), hébergé au CHRU de Tours.