Perdre sa maman en tant que jeune parent

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Minieyétie

Bonsoir,
Je suis toute nouvelle sur le forum, que j'ai découvert par hasard. J'ai 30 ans et j'ai perdu ma maman le 26/12/2018. Elle avait 62 ans. Elle avait été diagnostiquée en mai 2016 pour un myélome multiple stade 3, alors que j'étais enceinte de 2 mois. Dès ce moment, j'ai compris que ses jours étaient comptés. La moelle osseuse, ce n'est pas un organe qu'on peut amputer. Alors, dans cette hypothèse, la mort est nécessairement inéluctable... Durant deux ans et demi, j'ai alterné entre espoir et désillusions, avant de vraiment comprendre, en novembre 2018, que la fin était très proche.

Ma fille a deux ans désormais et n'aura que très peu connu sa grand mère, juste entre deux séjours à l'hôpital et une période de rémission relativement courte.

J'étais extrêmement proche de ma maman, notre relation était fusionnelle. En outre je suis fille unique, donc ce lien était exclusif. On partait en vacances juste toutes les deux, je la voyais tous les week-ends ou presque, on s'écrivait des textos à longueur de journée... Un peu comme si elle était aussi une meilleure amie, avec qui la complicité était totale.

Et pourtant, avec la dégradation rapide de son état de santé, j'ai dû très vite faire le deuil de ces moments intenses passés ensemble. Troquer les virées fantastiques contre des journées entières passées à l'hôpital. Échanger les sorties en tête à tête à l'opéra ou au restaurant contre des soirées à l'ombre des poches de chimiothérapie.

Elle qui aimait tant la vie, elle était désormais devenue trop faible pour en profiter... Elle la voyait s'écouler loin d'elle, depuis son lit ou en salle de dialyse durant la dernière année. Parfois, j'étais tellement en colère contre cette situation, je me demandais... à quoi bon vivre ainsi, est ce encore la vie ou n'est ce que de la survie...? A certains moments je trouvais cela absurde, mais à chaque fois que je la voyais, j'essayais de ne pas y penser et de la distraire elle aussi du mieux possible. Mais au fond j'étais mortifiée par la vision de ma maman, devenue si faible et si maigre et qui semblait encore déployer un courage inimaginable malgré l'adversité. De ce fait, elle a toujours suscité chez moi une admiration sans faille.

Je me rends compte que mes propos sont décousus, mais je me sens tellement désemparée er misérable. Je n'ai même pas pu dire à ma fille que sa mamie était partie, alors qu'elle la cherche partout lorsque nous allons chez mes parents. Elle est si jeune encore et je suis anéantie de penser qu'elle n'aura pas la chance que j'ai eue de partager de moments complices avec elle.

J'aimerais avoir des témoignages de personnes qui ont perdu leur maman alors qu'ils étaient eux même parents de très jeunes enfants (moins de 3 ans). Comment leur expliquer l'inexplicable ? Comment réussir à être parent alors qu'on a perdu son parent, qui représentait un modèle pour soi ? Comment ne pas avoir peur de mourir soi même et de causer la même peine à son enfant ?

Depuis quelques jours je suis hantée par cette pensée que moi non plus, je ne vivrai pas bien vieux et je refuse l'idée que ma fille souffre autant que je ne souffre actuellement du fait de ma propre disparition.

Merci pour vos contributions.
Bonne soirée,
Anne

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Dr A.Marceau

Bonjour Anne,
Vos propos, qui ne sont pas décousus du tout, au contraire, vous vous exprimez très bien, sont très émouvants. Et j'espère que vous aurez des témoignages de personnes ayant vécu les mêmes événements que vous.
Votre fille de deux ans n'a pas conscience de ce qu'est la mort, un départ sans retour. Il faut juste lui dire que sa mamie est partie pour un long voyage. Et elle oubliera mais quand elle sera plus grande, vous lui parlerez de sa mamie et elle la découvrira à travers vous.
Tous les parents de jeunes enfants ont la hantise de disparaître trop tôt. Mais ne soyez pas hantée par cette idée, vous n'avez pas de risque particulier si bien que votre probabilité de "ne pas vivre bien vieux" est la même que pour tout bien-portant, donc très très faible.
Bien cordialement
Dr A.Marceau

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swo94

Bonjour,
J'ai perdu ma maman d'un cancer du poumon métastasé aux os - elle a dû être amputée d'une jambe - en novembre 2017. Puis, j'ai perdu mon papa, d'un cancer au pancréas en août 2018. J'ai une fille qui a 3 ans et demi. Aussi, elle était très jeune (elle l'est toujours) lors de ces drames. Nous avons essayé de lui expliquer tant bien que mal la maladie très méchante qui avait attaqué sa mamie puis son papy. Mais nous ne savons pas répondre à ses "pourquoi". Plus le temps passe, et moins elle en parle et sans doute les oubliera-t-elle. Outre mon sentiment de rage et d'impuissance face à ces injustices (mes parents n'étaient pas si vieux et surtout, ils ont énormément souffert), j'ai du mal à accepter qu'elle ne les connaîtra pas et qu'il ne restera quasiment rien d'eux. Mes proches ont beau me dire qu'elle les connaîtra à travers ce que je leur en dirais, dans la vie quotidienne, on ne parle pas si souvent des morts que ça...Surtout qu'ils vivaient loin de nous et donc ma fille a assez peu partagé des choses avec eux. On a quelques photos, qui ne sont que du papier désormais.
J'ai lu à ma fille "Au revoir blaireau" et "La découverte de Petit Bond". Je n'ai pas l'impression qu'elle ait peur de la mort. Elle ne comprend tout simplement pas qu'elle ne peut pas revoir ni sa mamie, ni son papy. Ils sont "très morts" comme elle dit...

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Amelie89

Bonjour, je viens de perdre mon papa hier d'un cancer du poumon métastase au cerveau. Il est tombé malade il y a presque 3ans quand j'étais enceinte de ma première fille, il n'a plus su marcher du jour au lendemain mais s'est vraiment battu. Nous nous étions préparé au fait qu'un jour ou l'autre il partirait mais le choc de la mort brutale sans avoir pu lui dire au revoir me laisse sans voix et démunie... Je nose pas en parler avec ma fille, elle adore son papy et est encore tellement petite. Mon père ne voyait que pour elle.

Avez vous trouver des sites de soutient pour les personnes ayant perdu un proche du cancer ? Merci

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Dr A.Marceau

Bonjour Amélie,
Je comprends parfaitement votre désarroi et votre chagrin face à un deuil aussi cruel. Le fait que votre père ne pourra profiter de sa petite-fille et vous du plaisir de les voir ensemble ne fait qu'accentuer la cruauté d'un tel deuil. Mais le temps fera fort heureusement son œuvre sous forme du travail de deuil que chacun fait en pareille circonstance. C'est long, c'est difficile, mais vous avancerez et votre fille avec vous.
Vous pouvez vous faire aider notamment en rejoignant un groupe de parole comme peuvent en proposer les comités départementaux de La Ligue.
Bien cordialement
Dr A.Marceau

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annelau

chère Anne
je me reconnais dans ce que vous dites.
Je ai perdu ma mère je étais enceinte et mère de un garçon de un an
je ai perdu ma meilleure amie ma confidente
depuis je suis triste tout le temps. Les gens disent vas de l avant mais c'est impossible

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lola84

Bonjour Anne,
Je me reconnais également dans votre témoignage.. J'ai 34 ans, j'ai perdu ma maman début janvier d'un cancer du poumon à 69 ans et j'ai deux garçons, de 2,5 ans et 5 ans. Bizarrement, on me dit que le temps fait beaucoup mais pour moi, plus le temps passe, plus la douleur et le manque se font ressentir. Les 1ers jours, on est entourés; les gens demandent de nos nouvelles etc. puis au bout d'une semaine, la vie reprend son court pour tout le monde sauf que pour moi, ma maman est morte, elle le sera encore demain et c'est insupportable. Nous étions proches, elle m'appelait tous les jours + les sms + les mails. C'était souvent trop, nous n'avions pas toujours quelque chose à dire. mais cétait la seule personne avec qui ces appels faits de "rien" étaient possibles. la seule personne qui, quand il faisait froid, m'appelait pour savoir si "pas trop froid aux pieds ?, je t'apporte des chaussettes chaudes à ton travail ?" Bien sûr, je l'envoyais bouler. Mais aujourd'hui il fait froid, j'ai froid aux pieds et tout le monde s'en fou. Elle s'occupait beaucoup de mon fils de 5 ans, un peu moins du plus jeune. j'ai dit au "grand" que sa grand mère était partis au ciel, avec les nuages. Je crois que cette image lui a plu. Quand nous voyons un joli ciel, je lui dit que sa grand mère nous envoie un petit signe, j'essaie d'en parler souvent pour qu'elle reste à son esprit le plus longtemps possible, qu'il s'en souvienne. Le petit ne parait pas perturbé, je lui en parlerai quand il saura en âge de poser des questions je pense.
J'ai dû mal également en ce moment à me sentir mère alors que la mienne n'est plus là. Je n'ai pas envie, j'ai envie de redevenir petite, de me blottir dans les bras de quelqu'un et j'avoue qu'avec mes enfants en ce moment, je n'ai pas beaucoup de patience. heureusement que mon conjoint prend le relais mais je suis à fleur de peau et j'ai parfois des moments où mes larmes coulent toute seules, sans je puisse m'arrêter.

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Eve26

Bonjour,

Votre commentaire date mais me fait tellement penser à mon histoire, et celle de ma maman.. J’ai 34 ans, deux enfants de 4 et 5 ans. Ma maman les aimait tellement. Elle est presque partie du jour au lendemain, le 1er décembre 2023 diagnostic de leucémie myéloïde aiguë, une semaine après c’était terminé. Ça a été terrible elle était si mignonne, elle ne méritait pas une telle maladie si foudroyante, elle ne lui a laissé aucune chance. Depuis ( cela fait un mois et demi ), je ne peux plus l’appeler juste parce que j’en ai envie, c’était la seule avec qui je pouvais faire ça … elle ne sera plus là pour voir que mes yeux sont noircis par la fatigue, pour remarquer que je tousse. J’ai aussi du mal dans mon rôle de maman, et mon conjoint prend beaucoup le relai. Je n’ai pas de patiente. Je revis mon enfance en pensées je regrette tellement de ne pas avoir eu la conscience de l’importance de ces moments … j’aimerais tellement qu’elle soit là . Je me reconnais tellement dans votre témoignage. Vous en êtes vous sortie? Comment avez-vous fait pour aller mieux, sans l’oublier ? 
Merci à vous si vous répondez. 

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Minieyétie

Bonjour Eve26,

Je suis la personne à l'origine de ce post et je viens de le voir suite à une notification reçue par mail .

Sincères condoléances à vous, la situation que vous vivez est très difficile et je comprends votre ressenti. Il est tellement difficile de faire bonne figure et d'avoir l'impression d'être à la hauteur de ce qu'on voudrait faire pour être une "bonne mère" dans un tel contexte...

Surtout, prenez appui sur votre conjoint, laissez le vous épauler et prendre le relais avec vos enfants dès que vous en ressentirez le besoin, car ce sera la meilleure preuve d'amour qu'il pourra vous apporter. Et prenez le temps nécessaire pour prendre soin de vous, panser vos blessures, repenser au passé, pleurer... et faire tout ce que vous aurez besoin ou envie de faire.

Pour ma part, 5 années ont passé depuis la disparition de ma maman. Je pense à elle tous les jours, mais la douleur est moins vive avec le temps. Seuls certains moments ou situations restent particulièrement sensibles (les fêtes de Noël, qui coïncident avec son décès, sa date d'anniversaire, les anniversaires de façon générale, certains endroits où je vais, certains films ou musiques...)

Le manque, lui, ne disparaît pas, mais je parviens désormais à voir les choses différemment. Je souris quand je vois ma fille ainée de 7 ans me regarder, car le bleu de ses yeux ressemble à celui de ma maman. Je m'amuse de voir ma fille cadette de 3 ans et demi, qui n'a jamais connu ma maman pourtant, utiliser certaines de ses expressions, car elles font toujours partie de mon vocabulaire. Je me sens heureuse quand j'emmène ma fille ainée voir des ballets classiques, car ma maman adorait ça et c'est également le cas de ma fille. Et avec mon père, mon conjoint et toutes les, personnes qui l'ont connue, on se remémore certains moments avec joie, nostalgie ou amusement en fonction des cas .

Avec le temps, j'ai pleinement pris conscience qu'elle n'était plus, qu'il n'y aurait plus de nouveaux souvenirs et qu'elle n'est pas là à des moments importants où j'aurais voulu qu'elle soit là. Mais, dans le même temps, elle est partout en nous, dans nos cœurs et dans nos têtes...

N'hésitez pas si vous avez besoin d'échanger.

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Eve26

Bonjour,


Merci de votre retour, c’est vraiment très bienveillant de votre part. C’est une situation irréelle, qu’il est compliqué de vivre. 
Merci de votre témoignage très sincère. J’essaie de la faire vivre auprès de mes enfants, en entretenant le souvenir. 

Elle me manque tant.

N’hésitez pas si vous avez besoin également, et encore merci. 

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Marine P.

Bonjour,

 Je vous souhaite plein de courage. Je me reconnais mal heureusement beaucoup trop dans vos recits.

Jai perdu ma maman le 15 novembre 2023 alors qu'elle avait 68ans. Maman de 2 enfants de 6 et 9ans je me retrouve vide et orpheline. Je traverse des mois encore plus durś qUE les premiers. 

Apres tout ce quelle a traverse en quasi 3ans de combat contre un cancer de la vulve avec un sourire et une force exceptionnelle jus quau bout ppur nous, jessaye de me convaincre quelle ne souffre plus mais cest bien trop dur.

Nous arrivions a nous relever et profiter des pires moments de sa maladie car nous etions ensemble.

Ma fille de 9ans avait un lien tellement puissant avec sa mamie. Mon fils de 5ans aussi mais il nexprime pas son manque de la meme facon.

Je ne trouve pas les mots par écrit tellement je me retrouve vide a certains moments. 

Bon courage a vous en tout cas et merci a l'auteur de cet echange. Votre temoignage est important pour se dire quun jour il est possible qUE ce soit different avec le temps car ca parait aujourdhui insurmontable

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