Bonjour Delphine,
Tout d'abord, un grand merci pour ce témoignage remarquablement écrit et surtout qui montre combien il est important de partager ses ressentiments pour mieux combattre la maladie. Je vous souhaite le meilleur pour la suite et vous remercie d'ores et déjà pour les prochains rendez-vous que vous nous promettez afin de nous tenir au courant.
Bien cordialement
Dr A Marceau
Bonjour,
J'ai découvert en juillet dernier une boule dans mon sein droit. J'en ai parlé à mon mari immédiatement. Je souligne cette action qui m'a permise et me permet encore d'en parler avec ma moitié librement. Mon médecin généraliste m'a prescrit une mammo qui a été faite dans la semaine. Le radiologue m'a immédiatement redonné un rendez-vous pour faire une micro-biopsie...
La spirale commençait. Les angoisses, la peur de la maladie, la peur d'avoir mal ont surgi.
Le rendez-vous pour la micro-biopsie est arrivé. Le radiologue était très concentré et particulièrement silencieux. Et puis, il m'a conseillé de me rapprocher d'un service de cancérologie. Je ne comprenais pas à l'époque que l'on pouvait voir un cancer sans avoir fait l'analyse des tissus. Mais il avait raison, les images avaient parlé. Quelques semaines plus tard, m'a été confirmé que j'ai le cancer du sein.
Nous avions réfléchi avec mon mari où j'irai me faire soigner. J'ai contacté le service en question et la prise en charge s'est opérée rapidement. Rapidement mais en même temps tout me semblait long. Une dizaines de rendez-vous m'ont été donnés entre le 19 septembre et le 25 octobre. 25 octobre, jour de la chirurgie.
Durant toute cette période, je suis passée par différentes émotions : l'angoisse, la peur, la tristesse, la peine mais également la joie, l'amour, l'envie, la douceur. Mon mari, le pauvre, a subi toutes ses émotions, essayant de me rassurer, me disant que cette maladie ne changerait rien dans notre amour. Mais ce n'est pas si simple quand on vous annonce qu'il serait plus sage de retirer le sein dans sa totalité. Je n'arrivais pas à accepter que mon mari puisse être indifférent quant à son amour pour moi et la mutilation que j'allais subir. Comment l'amour pour sa femme peut rester intacte après une telle chirurgie ? La poitrine, signe de féminité. Il a fallu que j'accepte la position de mon mari. J'ai fait un gros travail sur moi-même pour accepter que le regard de mon mari ne changerait pas, poitrine entière ou demi poitrine.
La chirurgienne a compris ma grande souffrance psychologique face à la mastectomie et m'a proposé une reconstruction immédiate avec un expandeur. Ça n'a pas été simple mais le cheminement s'est fait. Ma hantise était de perdre mon sein et d'avoir un truc en remplacement. Mais à quoi allais-je ressembler ? Et mon mari, une fois l'opération terminée, allait-il vraiment accepter mon nouveau moi ?
Le jour de l'opération est arrivé (mercredi dernier).
Le lendemain, lorsque le médecin a retiré le pansement compressif, j'avais peur de découvrir mon nouveau moi. J'ai refusé de voir. Et puis, l'équipe soignante a été très à l'écoute. Au fil de la journée, le cheminement a porté ces fruits et j'ai découvert mon nouveau sein. Quand j'ai vu, j'ai été soulagée, heureuse. J'ai vu un sein. Mon nouveau sein. Marqué par la cicatrice, bleui, oui mais j'avais quelque chose, une forme qui ressemblait à quelque chose. Quel soulagement ! Et puis, dans la même dynamique, j'ai demandé à l'infirmière qui m'a accompagnée dans cette étape de faire découvrir mon nouveau moi à mon mari. J'ai vu dans son regard un soulagement quand il a vu ce petit sein, un peu balafré et bleui, mais là !
Aujourd'hui, je vais bien. J'aime ma poitrine même si le chemin n'est pas fini.
Prochaine étape, résultat de l'analyse des tissus et ganglions retirés lors de l'opération pour avoir la suite du protocole. Mais n'y pensons pas. L'étape du jour est du repos, de l'amour, de la douceur, de la reconstruction pour affronter sereinement l'étape d'après.
Cela me procure beaucoup de joie et de sérénité de vous écrire et de partager mon expérience. J'espère que ce témoignage pourra aider.
Je vous donnerai la suite du témoignage au fil des mois.
Delphine