Cancer de mon conjoint

2 commentaires
Image profil par défaut
Ap85

Bonsoir à tous,
J’ai 28 ans, mon conjoint en a 36 et nous nous battons depuis maintenant 4 ans... nous avons appris il y a quelque jours la seconde récidive de son cancer. Tout a commencé en 2015 avec une petite gêne au niveau de la mâchoire, après une première opération les résultats nous indiquaient que cela était bénin. Mais quelques mois plus tard la grosseur est revenue x10. Après de multiples rendez vous et examens nous apprenons qu’il s’agit d’un ostéosarcome. De là a commencé une longue période de traitement (environ un an avec 10 cure de chimio de 3 jours chacune) et une opération chirurgicale très importante (12h d’opération et presque 1 mois de hospitalisation). Les résultats étaient plutôt encourageants mais un an plus tard, première récidive avec 2 tumeurs qui apparaissent à chaque extrémité de l’exérèse. On nous annonce devant le bloc que la chirurgie est impossible, ce qui fut assez traumatisant. Nous n’avions plus beaucoup d’espoir mais finalement les médecins décident de faire de la radiothérapie (36 séances), qui s’est terminée en mai 2018. Depuis cette période tout allait bien nous avions retrouvé de nouveau une vie normale et en juin dernier des douleurs sont revenus petit à petit et une des tumeurs s’est remise à grossir. Et là nous apprenons (même si l’on s’en doutait) que la maladie est revenue. Évidemment la chirurgie est toujours impossible et la dose de radiothérapie a été tellement forte qu’il semblerait que ce soit impossible de lui en refaire si vite... l’oncologue nous propose soit une thérapie ciblée soit de la chimiothérapie. C’est à mon compagnon de décider ce qu’il préfère... je pense avoir compris que les médecins n’ont plus vraiment de solution... je me sens complètement perdue et je ne sais plus vraiment ce que je dois penser. Nous avions enfin une vie normale et nous essayions d’avoir un enfant depuis quelques mois. Je me sens complètement démunie et c’est très difficile de tenir le coup devant lui. Nous n’avons personne autour de nous et 90% des gens nous ont laissé tomber... nos familles me demandent de prendre sur moi pour lui mais je n’en ai plus la force, j’ai constamment envie de pleurer, je fais de grosses crises d’angoisses. Je ne sais plus vers qui me tourner ni quoi faire. Je veux prendre sur moi chez moi mais aussi quand je suis au travail, je garde tout pour moi et c’est de plus en plus dur. J’ai l’impression de devoir me préparer au pire mais c’est trop douloureux d’imaginer ma vie sans l’homme que j’aime et avec qui je partage ma vie depuis maintenant 8 ans. Je passe mon temps à lire des articles sur cette maladie, à essayer de trouver des essais cliniques ou d’autres solutions et c’est décourageant de ne pas trouver de solution... j’aimerais tellement que l’on ait une vie normale comme des gens de notre âge... cette maladie est tellement injuste!! mon homme est vraiment très courageux face à cette situation, j’admire tellement son courage et je suis vraiment fière de lui... Merci à tout ceux qui auront pris le temps de lire jusqu’au bout.

Image profil par défaut
Dr A.Marceau

Bonjour Alex,
Votre témoignage est très émouvant et on comprend votre désarroi face à ce long combat que vous menez avec courage auprès de votre compagnon.
La solitude que vous ressentez ne fait qu'amplifier votre désarroi, aussi je vous conseille de vous rapprocher du comité départemental de La Ligue. Sans doute pas très éloigné de chez vous, ce comité vous permettra de rencontrer des personnes qui savent ce que le combat contre le cancer impose comme efforts, comme investissement personnel, elles vous aideront à y faire face.
Bien cordialement
Dr A.Marceau

Image profil par défaut
ciboulette

Bonjour,
votre commentaire m'a ému. je cherchais un fil de discussion où partager, et je me dis que votre histoire pourrait ressembler un peu à la notre.
alors même sans vous connaître j'aimerai vous envoyer de la force et du courage.
quand c'est trop difficile, je m'enferme dans ma voiture et pousse la musique à fond jusqu'à me court circuiter le cerveau et ne plus penser à autre chose qu'au rythme de la musique.
je vois une psy. et j'ai fini par accepter l'aide des anti dépresseurs (mais je déteste cette idée), parce qu'en juin dernier j'ai fini par tomber moi aussi, et que je ne peux pas rester à terre, j'ai deux petites filles.

il y a deux ans, nous étions en route pour nos vacances en Bretagne. Mon couple allait mal et c'était un peu le dernier essai pour voir ce que nous pouvions recoller. pas de haine ou de détestation entre mon mari et moi, seulement le constat que nous avions évolué et que nous ne souhaitions plus du tout les mêmes choses. seulement ce constat occasionnait des tas de disputes. 6 mois avant j'avais fait un burnout et j'étais tombée dans un train pendant un trajet pour aller travailler à l'autre bout de la France.
toute seule à loin de chez moi, je me suis dit qu'il fallait que je change ma vie. j'ai commencé par changer de boulot. et j'ai parlé avec mon mari pour essayer de lui dire qu'il fallait que nous changions des choses.
nous n'avons pas réussi.
alors ce départ en bretagne...
le vendredi j'ai été très inquiète, il se plaignait de maux de tête. ne répondait pas au téléphone quand j'essayais de prendre de ses nouvelles depuis mon travail.
mais le soir et le samedi il semblait aller bien.
dimanche matin nous avons pris la voiture, direction Tours et notre première étape car depuis Lyon, voyager en une seule journée avec des enfants de 3 et 5 ans était impossible.
j'ai refusé de lui laisser le volant car je ne le trouvais pas bien.

toute la journée il a eu l'air étrange. à midi on aurait dit qu'il avait bu. il ne mettait pas les bons mots dans les phrases. il ne marchait pas droit.
le soir, à l'hotel, je lui ai forcé la main j'ai appelé le SAMU, ils ont parlé de possible problème de diabête et l'ont emmené aux urgences. je n'ai eu aucune nouvelle de la nuit. je suis restée seule à l'hotel avec mes deux petites filles.
le lendemain matin, j'ai pu l'avoir au téléphone il m'a dit "tout va bien c'est juste une carence en vitamine".
je suis allée le chercher. Les médecins nous ont dit "bonne route, il a juste besoin de se reposer, les vacances c'est ce qu'il ui faut".

deux heures plus tard, à l'entrée de la Bretagne, une paus esur une aire d'autoroute. il sort de la voiture et se met à vomir. il ne marche plus droit. il tombe sur la route et est complètement incohérent.
une passante prend en charge mes filles et les emmène jouer avec les siennes. son mari m'aide à appeler les pompiers. encore aujourd'hui je me dis que j'aimerai les retrouver et les remercier d'avoir été là...
mes filles ont vu tomber leur père. les pompiers m'ont dit de le maintenir couché. lui s'est relevé et s'est sauvé dans les champs, très en colère après moi parce que j'avais appelé les secours. il m'a dit des mots affreux.

les pompiers sont venus, l'ont récupéré. que le trajet entre l'aire d'autoroute et l'hopital m'a semblé long, a devoir tenir le choc pour ne pas alerter trop les filles, toute heureuses d'avoir vu les pompiers de près. suivre leur camionnette. arriver alors que lui est toujours furieux, contraint de rester assis dans un fauteuil roulant des examens.

je croise la médecin qui me tombe dessus "votre mari à ce genre de symptmoes et vous partez quand même en vacances???"... mais l'hopital le matin... on m'a laissé repartir ! on m'a dit de repartir !
mes parents m'aident à distance, me trouvent un appartement pour la nuit. j'y emmène mes enfants en attendant les résultats des examens.
mais à peine arrivé, l'hopital m'appelle. "il faudrait revenir je voudrais vous parler".
un trou. dans la poitrine. je ne sais pas exactement ce que l'on va me dire mais je sais que c'est mauvais.

une toute petite chambre grise. mon mari sur son lit. ma fille ainée assise sur une chaise. la plus petite par terre qui joue. j'en veux à la médecin de ne pas avoir demandé à faire sortir les enfants pour les épargner. "il y a une tumeur. et elle est très grosse".
je me retourne. la petite n'a rien entendu mais la grande à 5 ans, si elle n'a pas compris les mots, est une éponge et elle a tout compris. compris que c'est grave. que j'ai peur. que ça ne va pas.
les rassurer en gardant le cap. en ne craquant pas. demander calmement les suites. tenir la main de mon mari qui a entendu les mots mais est complètement à côté de la plaque. comme je me sens seule...
appeler sa maman pour la prévenir. il fait chaud sur le parking. je ne dois pas pleurer. je ne dois pas craquer au téléphone. je dois juste les prévenir. ils sont loin, ils vivent à l'étranger.
appeler mes parents. j'ai besoin d'aide. ils sont là.
mon mari est trop instable me dit on, il doit être transféré dans un service neuro à rennes.
j'attendrai jusque tard dans la nuit qu'on me rappelle pour savoir s'il est bien arrivé. s'il est toujours vivant.

le lendemain, aller à rennes dans un endroit qu'on ne connait pas, un hopital, avec ses enfants, pour essayer de savoir ce qui va se passer. il est transportable et pourra être emmené à Lyon.
seulement le lendemain, ils le perdent en route !!! après avoir tergiversé, on part ou pas, je n'arrive même pas à savoir où il est ! heureusement une amie qui travaille dans les services hospitalier le retrouve et me rassure. il va bien. enfin... autant que possible.
et je mesure ma chance. depuis cette annonce notre réseau d'amis est là. nous soutient. nous entoure et nous accompagne, ainsi que ma famille.

quelques jours plus tard, il y a une ponction de sa tumeur pour pouvoir dire de quoi il s'agit et le diagnostique est sans appel "glioblasthome de haut grade et haut stade". les statistiques disent... 80% de décès dans les deux ans. mais mon mari est jeune, et c'est assez rare à cet âge là alors je m'accroche à ce que j'ai entendu "ça peut durer deux jours ou 10 ans". je m'accroche à l'idée des 10 ans.
le 15 août les hopitaux... il y a peu d'effectif. on me renvoie mon mari chez moi. un mois à préparer un déménagement que nous avions prévu et que je ne pouvais pas annuler. un mois sans sommeil où je vérifie qu'il n'a pas cessé de respirer. un mois où je le retrouve debout demi nu à côté du lit parce qu'il ne sait plus où sont les toilettes parce qu'il a perdu la tête...
et puis il retombe. fait une nouvelle crise d'épilepsie en traversant la rue. comment je le porte sur le trottoir, je ne sais toujours pas...
je dirai plus tard, pour dédramatiser (essayer tout au moins).. "cette fois il a bien choisi il est tombé devant une caserve de pompiers". prise en charge immédiate. et moi je me dis "ça recommence. ne pas craquer. ne pas craquer.". l'accompagner à l'hopital. entendre les médecins se bagarrer parce qu'ils ne s'entendent pas et que cela fini par rejaillir sur le patient qu'ils se balancent à la tête... la radiologue veut qu'il soit hospitalisé, son collègue qui ne s'entend pas avec elle ne veut pas le lui accorder. il y a de quoi devenir folle...

finalement il sera hospitalisé dans un autre service.
et un midi on m'appelle "venez me voir avant d'aller voir votre mari s'il vous plait".
de nouveau ce trou dans la poitrine. le médecin me fait rentrer dans une toute petite salle, comme un placard à balais, une table deux chaises. "il y a une hémorragie. on ne peut rien faire. il faudrait prévenir ses proches.". silence "est-ce que vous avez compris?". oui j'ai bien compris. j'ai compris qu'il risquait de mourir dans le week end.
mais voilà, il est fort, et quelque part, quelque chose le soutient, il reste. il résiste.

et puis il va suivre une radiothérapie et une chimiothérapie. se sont des jours et des jours de courses sur ma pause de midi pour aller le voir tous les jours. pour emmener les filles le voir un soir sur deux. pour organiser les visites de nos amis pour le soutenir.
jusqu'à novembre. il rentre à la maison. il est redevenu lui même. nous pouvons parler. il comprend seulement à ce moment là ce qui s'est passé et ce qu'il a. je ne lui dirais qu'une seule fois quel est le pronostic, parce qu'il le demande. mais moi je veux qu'il vive. je veux qu'il reste.
pourtant nous prenons une décision difficile en février. parce que comme il va mieux, tous nos problèmes de couples sont de retour et nous passons notre temps à nous faire du mal.
nous choississons de divorcer. mais je voudrais pouvoir continuer à l'aider. et puis je crois toujours à ce qu'à dit le médecin. "peut être 10 ans".

nous avons divorcé un an plus tard, soit il y a quelques mois. en février. mais à Noël dernier... il a fait une rechute. il est de nouveau tombé. une personne admirable a pris soin de lui, une amie de sa famille. nous nous entendons mal mais elle a fait pour lui quelque chose d'extra ordinaire et l'a maintenu à son domicile jusqu'à la fin du mis d'aout. il a ainsi pu accueillir ses filles tous les week end. elles ont pu le voir autant que possible.
mais début septembre c'est devenu trop difficile. il avait de nouveau perdu la tête, se lève, tombe, se fait mal. n'est plus autonome. le voilà à l'hopital de manère définitive. le voilà en soins palliatifs.
nos filles ont aujourd'hui 5 et 7 ans et vivent la dedans depuis deux ans.
la plus petite n'a presque pas de souvenirs de son papa pas malade.
la grande est prafois si silencieuse...
pourtant, elles sont tout de même pleines de vies.
je leur ai tout dit, avec des mots les plus simples possibles. mais je ne leur ai rien caché.
simplement quand on leur explique qu'un jour assez proche papa va mourir... ça fait tellement mal de devoir répondre à ses enfants qui demandent "mais alors ensuite il se passe quoi?" : "vous n'aurez plus de papa".
ça fait mal aussi quand la petite n'ose plus faire de bisous à papa parce qu'elle a peur d'attraper "la tumeur qui mange le cerveau".
alors je re explique. je parle. j'essaie de l'accompagner lui quand je peux. maintenir le lien avec ses amis qu'il a choisi de rejeter l'année dernière, mais qu'il voudrait revoir aujourd'hui.

et... comme vous qui avez écrit ce message, on m'adit un jour "il va falloir être forte pour ta famille".
on me dit parfois "cest courageux". mais moi je me dis "je suis écroulée en dedans, simplement ils ne le voient pas".
je me répète assez souvent cette réplique d'une série célèbre comme une plaisanterie "il faut tenir le mûr". et c'est exactement cela. ne pas laisser apparaître la moindre fêlure car alors on ne sait pas ce qu'il en résulterait... tout tomberait.

je m'étourdie dans l'activité. je jamais s'arrêter. ne jamais prendre le temps de penser. être maitenue debout par l'action. parce que si je marrête et que je réfléchis... j'ai peur de tomber aussi.
nous avons divorcé. mais il a été le centre de ma vie pendant 15 ans. il est le père des mes filles. il est juste lui, admirable de courage et de gentillesse.

"il faut tenir le mur".
et prendre tout ce qui peut être donné. le soutien des personnes autour, et aller le chercher. certains se détournent parce que la maladie fait peur, d'autres simplement parce qu'ils ne savent pas comment faire pour aider. ils ont l'impression souvent de ne rien pouvoir faire... c'est faux.
n'hésitez pas à recontacter vos amis. essayez. dites que vous avez besoin d'aide. trouvez des gens à qui parler. un psy. il faut que ça sorte quelque part parce que vous allez exploser sinon...
et courage à vous.

Ecrire un commentaire

Pour écrire un commentaire ou lancer une nouvelle discussion vous aurez besoin de vous connecter ou de créer un compte.

Les intervenants du forum

Camille Flavigny
Chargée de mission Droits des personnes
Dr A.Marceau
Médecin, chargé des questions médicales
Conseiller technique Aidea
Accompagner pour emprunter
Back to top

Abonnez-vous à notre newsletter

Recevez l’actualité de la Ligue.