Soutien à la recherche

Le prix Nobel de médecine et physiologie 2025 récompense la découverte des cellules immunitaires T régulatrices

Après James P. Allison et Tasuku Honjo en 2018, le prix Nobel de médecine est une nouvelle fois remis à des scientifiques américains, Mary E. Brunkow et Fred Ramsdell, et japonais, Shimon Sakaguchi, pour des travaux ayant révolutionné la compréhension des mécanismes de régulation du système immunitaire au cours des années 1990[1]. Ces mécanismes sont aujourd’hui considérés comme cruciaux tant pour la compréhension de certains aspects du développement cancéreux que pour la conception d’immunothérapies anticancéreuses plus efficaces.

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Actu Prix Nobel médecine et physiologie 2025

La vision de la Ligue

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Claude Agnès Reynaud

La vision de la Ligue

« Les cellules T régulatrices sont un nouvel exemple de la capacité des tumeurs à pervertir les défenses immunitaires de l'organisme pour leur échapper. Un tel rôle n'était clairement pas anticipé par les chercheurs qui les ont décrites et qui voulaient avant tout déchiffrer les mécanismes de tolérance qui permettent à l'organisme de ne pas s'attaquer à ses propres tissus. 

C'est à nouveau un très bel apport de la recherche la plus fondamentale à la compréhension de la dynamique tumorale, et au développement d'approches thérapeutiques originales » Claude-Agnès Reynaud, Présidente du Conseil Scientifique National de la Ligue contre le cancer.

L’immunité, un subtil équilibre

Pour être manœuvrable, un véhicule doit être équipé d’un accélérateur et d’un frein : sans le premier, il n’avance pas ; sans le second, c'est l’accident assuré. Il en va de même pour notre système immunitaire, qui fait preuve d'une efficacité défensive redoutable mais doit être précisément régulé, bridé, pour ne pas attaquer nos propres organes. Les maladies auto-immunes, comme le diabète de type I (où le système immunitaire détruit les cellules du pancréas qui produisent l’insuline), illustrent l'importance de cette régulation et la nécessité de maintenir le système immunitaire sous un contrôle très étroit.

Des lymphocytes régulateurs

On doit aux trois chercheurs qui viennent d’être primés plusieurs découvertes fondamentales ayant abouti à la compréhension de la « tolérance immunitaire périphérique », l’un des mécanismes centraux du contrôle du système immunitaire. Leurs travaux ont notamment permis la découverte d’une catégorie particulière de cellules immunitaires, les cellules T régulatrices*, souvent qualifiées de « gardiennes du système immunitaire ». Ces « gardiennes » ont pour rôle de tempérer le système immunitaire, en bridant, par exemple, l’activité des cellules immunitaires qui détruisent ce qui menace l’organisme, les agents pathogènes et les cellules tumorales.

Microenvironnement immunitaire, macrointérêt

Notre conception du développement du cancer, depuis ses toutes premières phases jusqu’à son essaimage dans l’organisme et la formation de métastases, a beaucoup évolué au cours des trois dernières décennies. On sait aujourd’hui que ce développement dépend étroitement des relations qu’entretiennent les cellules cancéreuses avec différents types de cellules du système immunitaire, ce qu’on appelle le microenvironnement immunitaire*.

De la tolérance à la trahison

Dans ce contexte, il a été montré que l’activité des cellules T régulatrices « joue » en faveur du cancer en limitant la réponse immunitaire antitumorale. De plus, au cours de leur évolution, les cellules cancéreuses acquièrent la capacité d’attirer les cellules T régulatrices pour créer un environnement immunosuppresseur — c’est-à-dire un milieu où l’activité immunitaire anticancéreuse ne s’exprime plus — propice à leur développement. Cette activité délétère explique, au moins en partie, pourquoi les immunothérapies par bloqueurs de checkpoints* peuvent être inefficaces chez certains patients. En effet, l’environnement tumoral des patients qui ne répondent pas à ces traitements, d’emblée ou à cause de la survenue d’une résistance, est bien souvent fortement enrichi en cellules T régulatrices.

[1] nobelprize.org/prizes/medicine/2025/popular-information

Cibler les cellules T régulatrices ?

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cellule lymphocyte T

Cibler les cellules T régulatrices ?

Les connaissances sur le rôle des cellules T régulatrices sont venues relativement récemment enrichir le domaine de l’onco-immunologie, la discipline qui étudie les liens entre le cancer et l’immunologie. En révélant le rôle « d’alliées du cancer » que peuvent jouer, dans certains contextes, les cellules T régulatrices, la recherche les a également désignées comme des cibles thérapeutiques potentielles.

Plusieurs dizaines d’essais cliniques sont aujourd’hui en cours pour évaluer des approches thérapeutiques ciblant directement ou indirectement les cellules T régulatrices dans le traitement du cancer, notamment chez les patients résistants aux immunothérapies actuelles.

Encore une fois, une des difficultés auxquelles se heurtent ces stratégies est de parvenir à agir efficacement sur l’activité suppressive exercée par ces cellules sans trop débrider le système immunitaire et engendrer des effets secondaires trop importants… Une question d’équilibre, toujours.

En quelques mots

Le Prix Nobel de médecine et de physiologie 2025 distingue des travaux ayant permis de comprendre comment l’activité du système immunitaire est contrôlée. L’activité des cellules T régulatrices joue un rôle fondamental dans ce contrôle, et leur ciblage constitue aujourd’hui une piste thérapeutique explorée dans plus de 200 essais cliniques couvrant les domaines de l’auto-immunité, de la transplantation et de l’oncologie[2]. Encore une fois, le Prix Nobel vient nous rappeler à quel point la recherche fondamentale en biologie est incontournable pour faire progresser la médecine du cancer.

[2] reuters.com/business/healthcare-pharmaceuticals/brunkow-ramsdell-sakaguchi-win-2025-nobel-medicine-prize-2025-10-06/

Notions

Cellules T régulatrices
Microenvironnement immunitaire
Immunothérapies par bloqueurs de checkpoints
Cellules T régulatrices

Les cellules T régulatrices*, constituent un contingent particulier, une sous-population, de la famille des lymphocytes T, des « globules blancs » qui joue un rôle fondamental dans la réponse immunitaire dite « adaptive ». On les qualifie de « T » car les dernières phases de développement de ces cellules se déroulent dans le thymus, une glande situe dans le haut du thorax.

Microenvironnement immunitaire

Les tumeurs sont des écosystèmes complexes composés de cellules cancéreuses mais aussi de cellules normales variées, de vaisseaux sanguins et d’une grande diversité de molécules qui forment ce qu’on appelle le microenvironnement tumoral. Le microenvironnement immunitaire* correspond à la fraction des cellules immunitaires, dont les cellules T régulatrices, du microenvironnement tumoral.

Immunothérapies par bloqueurs de checkpoints

L’activité des cellules immunitaires qui s’attaquent aux cellules cancéreuses, principalement les Lymphocytes T cytotoxiques, peut être mise en sommeil, contrôlée par les cellules tumorales. Le principe des immunothérapies par "bloqueurs de checkpoints"* consiste à lever ce contrôle afin de restaurer la capacité des lymphocytes T à détecter et détruire les cellules du cancer.

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